jeudi 25 mars 2010

L'affaire Karl Atride - Part II

La petite pièce sentait le renfermé et la nourriture périmée. On l’avait vidé des caisses de ravitaillement qu’elle contenait pour pouvoir accueillir le prisonnier. On avait posé à la hâte un lit de camp et un seau avant d’y amener le capitaine Atride. Celui-ci se laissait faire, encore sous l’effet du tranquillisant qu’on lui avait administré. Deux hommes le posèrent sur le lit de camp avant de quitter la pièce.

Atride resta un petit moment assis sur le lit à regarder dans le vide, un peu de bave coulant de sa bouche à travers sa barbe en broussaille. Il était torse nu et on avait enlevé les lacets de ces bottes. Une caméra avait été posée en hâte dans la pièce pour garder un œil permanent sur le prisonnier. Depuis son bureau, le colonel regardait l’écran et soupira en voyant l’état du capitaine. Cette fois-ci il ne pouvait rien faire pour arrondir les angles. Il avait un rapport de l’Adeptus Mechanicus devant lui et les faits étaient accablants.

Cette fois-ci Atride avait non-seulement commis un crime de Tech-Hérésie mais il avait aussi tué deux technoprètres. Applewood n’était pas du genre à céder aux pressions des prêtres de Mars mais la situation était beaucoup trop grave pour être ignorée une fois de plus. Atride était connu depuis longtemps par le Munitorum et l’Adeptus Mechanicus pour avoir la fâcheuse tendance d’apporter des modifications totalement illégal à son matériel et celui de ses hommes.

Le colonel relu encore une fois le dossier du capitaine et soupira devant le gâchis qui se préparait. Son régiment ne pouvait pas se passer d’Atride, il était le représentant du bataillon RSL et le plus haut gradé des survivants du 8ème de Necromunda. C’était un véritable leader, aimé de ses hommes, icône vivante de l’esprit de Necromunda ainsi qu’un fervent partisan de la fusion qui avait donné naissance au 133ème NLGB. Malheureusement, l’Adeptus Mechanicus était tout aussi indispensable au régiment pour toute la gestion de l’entretien et des réparations des blindés du régiment. Applewood ne pouvait pas prendre de partie. C’est pourquoi il avait fait le pari de nommer Grass à la défense d’Atride. Il comptait sur l’esprit vif du jeune commissaire pour obtenir un miracle.

Applewood reporta son attention sur Atride. L’officier, même sous tranquillisant, donnait une impression de force et de violence. Ses longs cheveux noirs, encore une entorse au règlement, le retombaient devant le visage. Le Colonel avait l’impression d’avoir mis un lion à la crinière noire en cage. Applewood ausculta les différents tatouages et cicatrices présents sur le corps de l’homme. Les cicatrices racontaient l’histoire d’une vie de violence et de combats tandis qu’on lui avait expliqué que les tatouages étaient des souvenirs des années d’Atride en tant que chef de gang sur Necromunda.

Le capitaine était un Van Saar, un des gangs majeurs de la cité ruche principale. En tant que tel, en plus d’être un guerrier aguerris, il avait de grandes connaissances techniques parfois supérieures à celles de certains technoprètres, comme une bonne partie du 8ème Necromunda qui historiquement était composé majoritairement de ganger issu de la famille Van Saar. Bien entendu cela déplaisait à l’Adeptus Mechanicus et à travers toute son histoire le 8ème avait eu des troubles avec le clergé martien.

L’intercom de son bureau sonna, Applewood actionna la rune de réception et écouta :

- Colonel, le commissaire Grass vient d’arriver au quartier général. Il demande à rencontrer le prisonnier pour préparer le procès.

- Merci Sergent, il peut aller rencontrer l’accusé. Dites lui que Mars fait pression et que l’audience commencera dans trente minutes.

- A vos ordres colonel !

Applewood soupira longuement avant d’allumer un cigalho. Il tira quelques bouffées avant d’être pris d’une violente quinte de toux qui le laissèrent hors d’haleine. Il n’écrasa pas pour autant le petit cylindre de mort et reprit l’étude du dossier.

Grass pénétra dans la petite pièce où était retenu le capitaine en compagnie d’un officier médical et de Prunacs son ordonnance. Le docteur injecta un léger stimulant au capitaine, vérifia son pouls et sa tension puis quitta la pièce. Prunacs posa la chaise qu’il avait prise avec lui devant le capitaine puis alla se mettre debout dans un coin de la pièce. Grass alla s’assoir devant le capitaine en ouvrant le dossier de l’affaire. Atride reprenait petit à petit ses esprits.

- Bien capitaine, commença Grass, on dirait que vous avez encore des ennuis.

- Humpf, grommela Atride dans sa barbe.

- Vous dites capitaine ?

- Faites votre boulot et qu’on en finisse, je le mérite ce putain de bolt dans ma nuque.

- Vous faites fausse route capitaine, vous allez passer en court martial et je suis là pour vous défendre pas pour exécuter.

- En court martial ? Bande de crétins, vous allez faire perdre du temps à tout le monde.

- Je pense que le colonel a un autre avis sur la situation.

- Le vieux ? En quoi ça le concerne, c’est moi qui ai descendu les deux têtes d’engrenages.

- Justement, je pense que tous le monde serait enchanté de savoir pourquoi vous avez abattus deux serviteurs de l’Imperium sur leur lieu de travail après avoir été surpris les mains dans les circuits consacrés d’un générateur de champ de force modèle Cérès Mark IV, si ce que je lis dans le rapport est exact.

- Ouais, c’est vrai. Je les ai tués, point final. Je suis coupable.

- Capitaine, cette attitude ne va nous servir à rien. Je suis là pour vous aider et j’ai besoin de votre confiance. On va reprendre depuis le début.

Grass marqua une pause et se tourna vers Prunacs. Il lui fit signe de quitter la pièce. Prunacs hésita un instant avant d’obéir. Il vit le commissaire se lever et débrancher la caméra. Prunacs sortit de la pièce passa entre les deux gardes chiourmes et ferma la porte derrière lui avant d’aller attendre que le commissaire fasse à nouveau appelle à lui.

Prunacs regarda sa montre et nota qu’il ne restait plus beaucoup de temps avant le début du procès. Il n’avait jamais eut l’occasion de voir le commandant de son bataillon d’aussi près et il avait été impressionné par celui-ci. Prunacs commençait à bien connaître les natifs de Necromunda qui formaient la colonne vertébrale de son bataillon. Il les avait au début considéré comme des brutes venant des zones à peine civilisé des ruches de l’Imperium, comme on pouvait en voir tant dans les fictions qui été diffusées sur Bittorea.

Finalement, les Van Saar étaient des hommes et des femmes tout à fait fréquentables, avec leur culture et leur code d’honneur. Les natifs de Necromunda avaient accueillis les nouvelles recrues de Bittorea avec beaucoup de diplomatie et de patience et après quelques temps les deux cultures finirent par se mélanger et s’harmoniser. Prunacs savait que ceci était dû à la volonté du Capitaine Atride et du Colonel Applewood.

Atride se comportait avec son bataillon comme un chef de gang et pas comme un officier de la garde impériale. C’était une figure paternelle, dure mais juste et qui n’hésitait jamais à accomplir les mêmes taches que ses hommes.

Prunacs avait beau se dire que le Capitaine avait commis une hérésie, il souhaitait que le Commissaire Grass trouve un moyen de le sauver.

Après une dizaine de minute la porte s’ouvrit sur le Commissaire qui semblait toujours aussi inquiet.

- Prunacs veuillez donner au capitaine un nécessaire de toilette qu’il puisse ressembler un peu plus à un être humain et moins à un ours. Quand à vous Capitaine, on se revoit au procès.

Grass sortit de la pièce après que Prunacs y fut entré. Ce dernier déposa le nécessaire de toilette et sortit de la pièce après avoir reprit la chaise. Avant de sortir de la pièce, il nota que la caméra était à nouveau en marche.

Atride regarda la porte se fermer et son visage esquissa un sourire. Il ouvrit sa main gauche et regarda la lame de scalpel qu’il y avait caché durant tout l’entretien. Son plan d’origine était de trancher la gorge du commissaire, de prendre le soldat en otage et d’essayer de s’enfuir. C’est pour cela qu’il avait toujours une lame de scalpel caché dans les replis de tissus cicatriciels d’une fausse cicatrice faite à base de synth-peau. Mais le discours de Grass l’avait convaincu, il allait faire confiance au jeune commissaire. Il pourrait toujours essayer de s’enfuir plus tard.

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