L'Avenement - Chapitre 12

Chapitre 12 :

Un nouveau départ

Thsczyikhaar observait le cadavre de Max. Il ne l’avait jamais rencontré mais il se sentait proche de lui comme lié par le destin. Aussitôt qu’il avait sentit que quelqu’un se servait de son trident il avait tenté de se téléporter dans la zone. Quelque chose ou quelqu’un l’en avait empêché et il était arrivé trop tard.

Sarah se mit à se tortiller dans ses bras et demande :

- Qu’est ce qu’il se passe Tonton ? Pourquoi on a dut partir à toute vitesse ? Et pourquoi tu veux pas que je regarde ?

- Soit patiente ma puce s’il te plait, dit simplement Thsczyikhaar.

Sarah reconnut au ton de Thsczyikhaar qu’il ne fallait plus qu’elle pose de problème. Elle s’immobilisa et se mit à attendre. Thsczyikhaar se demandait ce qu’il allait faire maintenant. Il ne sentait absolument plus aucune trace de son arme, n’avait plus aucun indice et se doutait bien que cette fois ci c’était plus qu’un simple voleur qui avait agi. Mais il y avait autre chose au fond de lui qui le tourmentait. Il n’arrivait pas encore bien à mettre le doigt dessus mais en tout les cas c’était ça qui le retenait pour le moment d’agir. Il avait besoin de temps et de réflexion. Il se demanda ce qu’il allait faire du corps de Max et se décida de ne rien faire préférant éviter les ennuis et laisser les locaux s’occuper de ça. Thsczyikhaar s’éloigna de la scène avec Sarah dans les bras et partit à la recherche d’une auberge pour la nuit. Il ne remarqua pas que pendant tout ce temps un petit gens l’observait attentivement. Sur la route vers l’auberge, il croisa plusieurs personnes qui sortaient de chez elles, après s’être cachées, effrayées par la course poursuite, et qui voulaient maintenant voir le résultat.

Thsczyikhaar entra dans la première auberge qu’il trouva et demanda machinalement une chambre et deux repas. Il jeta une poignée de pièce d’or sur le comptoir, ce qui représentait assez d’argent pour rester presque un mois dans l’auberge et monta dans la chambre. Durant tout se temps, il n’avait pas lâché Sarah et elle n’avait pas dit un mot. Il arriva dans la chambre, posa Sarah sur le lit et alla s’assoir dans un fauteuil le regard perdu par la fenêtre, fixant la lune naissante. L’ironie du sort voulut que la chambre, qu’ils occupaient, fût voisine de celle que Max occupait quelques heures auparavant.

Sarah observait Thsczyikhaar. Elle était inquiète, elle n’avait jamais vu son oncle dans cet état. C’était la première fois qu’elle le voyait autrement qu’avec son habituel exubérance et son attitude nonchalante. Même quand il se mettait en colère ou qu’il tentait d’être ferme c’était avec une pointe de « n’importe quoi » comme elle aimait à dire. Il y avait toujours cette petite flamme espiègle dans le regard de Thsczyikhaar pour la rassurer quand à ces intentions. Et là pour le moment, la flamme avait disparue et cela inquiétait beaucoup Sarah.

On frappa à la porte, devant l’absence de réaction de Thsczyikhaar, Sarah se leva et ouvrit la porte. C’était l’aubergiste avec deux bols de soupe, du pain et des fruits. Sarah prit rapidement les plats et ferma la porte après avoir renvoyé maladroitement l’aubergiste. Elle posa son repas à coté de Thsczyikhaar et elle s’installa sur le lit pour manger le sien. Voir son oncle comme ça lui coupa en partie l’appétit mais comme elle ne voulait pas lui faire de peine elle se força à manger.

Quand elle eut finie, elle alla chercher ses affaires de magie dans le sac de Thsczyikhaar. Elle ne comprenait pas pourquoi quand elle ouvrait le sac elle trouvait toujours uniquement ses affaires avec une pomme. Il devait y avoir de la magie là-dessous. D’habitude, Thsczyikhaar lui donnait des exercices précis dans le cadre de sa formation mais là elle était un peu livrée à elle-même. Elle se demanda un moment ce qu’elle allait faire quand son regard se posa à nouveau sur le sac de son oncle. Une idée lui vint à l’esprit, elle prit le sac et le posa sur ces genoux. Elle se concentra et lança un sort de lecture de la magie avant de se mettre à examiner le sac et sa structure magique en détail. C’était très complexe et elle mit beaucoup de temps à comprendre la moindre information. Elle faillit abandonner plusieurs fois mais finalement elle réussit à entrevoir la base du réseau magique.

Pour essayer de mieux comprendre elle essaya de se mettre dans la peau de Thsczyikhaar, elle essaya d’adopter sa façon de penser anarchique, déstabilisante et définitivement chaotique. Cela fonctionna relativement bien et petit à petit, morceau par morceau elle comprit la base de la structure du sac sans fond. Elle comprit par exemple que pour faire de même il fallait fabriquer le contenant soi même et que la matière du sac était très particulière. Etrangement, il s’avérait que le tissu du sac avait presque les mêmes qualités que les cheveux de Sarah. Elle ne chercha pas longtemps à savoir pourquoi mais elle se coupa rapidement une bonne longueur de cheveux pour essayer de se faire aussi sa petite poche sans fond. Elle travailla longuement et durement pendant que Thsczyikhaar fixait toujours la nuit étoilé.

Au bout de plusieurs heures, Thsczyikhaar finit par se redresser et s’approcha de Sarah. Elle fut surprise par le mouvement de son oncle et toujours très inquiète de ne pas retrouver la flamme de son regard. Thsczyikhaar fit les cent pas pendant quelques instants avant de prendre la parole d’une voix un peu vacillante :

- Je vais te demander de m’écouter sagement Sarah. J’ai des choses importantes à te dire. Cela fait maintenant un bout de temps qu’on est ensemble et je pense que tu as le droit de connaître la vérité, toute la vérité. Je pensais te protéger en te cachant des choses mais en fait c’est moi que je protégeais. Je m’appelle Thsczyikhaar ThaarZhuh et je suis un Tieffelin. Mes parents étaient en partie des fielons, des démons si tu préfères, et mes grands parents l’était complètement. J’ai vécu pendant longtemps dans ce que les gens normaux appellent les Enfers. J’ai tué beaucoup de gens et fait des choses pires encore. J’ai mentit, manipulé et même si parfois je le nie j’ai aussi volé. J’ai massacré des races entières, j’ai mis en place des choses juste pour voir les effets sur les gens. Je ne respecte rien et tout ce qui m’est soit disant interdit me tente. J’ai participé à la création d’un nouvel enfer. Et tout cela dans un seul but, ma satisfaction personnelle. Je ne fais jamais rien de désintéressé, même en amour et c’est pour cela que ça n’a pas bien marché. Je suis un opportuniste particulièrement ambitieux. Je ne suis pas un gentil, je me sers des gens et je les jette, voir pire. Et c’est ce que je comptais faire avec toi. Je comptais retrouver mon trident et repartir vivre ma vie sans un regard en arrière.

Thsczyikhaar marqua une courte pause et observa Sarah. Elle ne semblait pas bien comprendre toute l’ampleur du message et seules les dernières phrases l’avait un peu touché.

- Je veux que tu te rendes bien compte de qui je suis. Je suis un monstre. Une créature qui dans vos légendes à le rôle du méchant. J’ai des pouvoirs phénoménaux mais je ne m’en sers jamais pour les autres. Je mange régulièrement de l’elfe, sans aucun remords. J’en fais même une sorte d’élevage. D’ailleurs, je mange régulièrement toutes sortes de races intelligentes. Je n’ai pas d’amis et je m’en fiche, de toute façon je n’aime pas les boulets. Et Sarah, il faut que je sois honnête, tu es toi aussi un boulet à mes yeux, un boulot mignon et amusant mais un boulet quand même. Pendant toutes ces semaines, je ne sais pas exactement ce que je voulais avec toi. Je pense que je voulais essayer de faire ce que j’avais raté avec ma dernière fille, la seule que j’ai put voir grandir. Tous les autres me connaissent à peine. Mais maintenant, elle est morte, comme ma première femme et c’est de ma faute. Et plutôt que de me remettre en cause quand je l’ai appris, j’ai pris les armes et j’ai un bazar monstrueux qui dure encore à notre époque et au passage j’ai pensé à une chose encore, ma satisfaction personnelle. Et donc te voilà toi, avec tes grands yeux larmoyants, et moi qui veut faire comme si j’avais une seconde chance. Et qu’est ce que je fais, je mens encore pour ma satisfaction. Tu n’es pas ma fille. Tu es une elfe orpheline et pendant longtemps tu n’aurais pas été autre chose à mes yeux qu’un en-cas. Il faut que te montre quelque chose.

D’un geste fluide, Thsczyikhaar repris sa véritable apparence et non plus celle de l’aimable humain aux cheveux roux. Il se montra sous toute sa sinistre splendeur devant la jeune fille terrifiée. Il lui sourit de ses dents en pointes et lui dit d’une voix plus sifflante et moins humaine :

- Voilà ce que je suis vraiment. Aujourd’hui, j’ai retrouvé celui qui m’avait volé mon trident et que je poursuivais en ta compagnie. Ce n’était pas un ami, c’était un voleur et aujourd’hui il s’est fait tué. Mon trident a disparu et je n’ai plus aucune trace de lui. C’est une grosse perte pour moi et cela va me poser des problèmes pour rentrer chez moi mais avec le temps je devrais pouvoir arranger ça. Mais je n’ai pas envie de rentrer chez moi, je n’ai plus envie de retrouver mon trident. J’ai envie de reprendre les choses à zéro. En dépit de tous mes mensonges, j’ai appris des choses à ton contact et j’aimerais continuer. Cependant, il fallait avant que je te donne toutes les informations. Je ne veux plus te mentir, je veux construire une relation saine avec toi. Je veux que tu saches qui je suis réellement. Je sais que tous ce que je viens de dire est très compliqué et que tu n’as peut être pas tout compris. Mais tu es intelligente et je sais que tu as compris l’essentiel. Tu vas avoir à faire un choix, soit tu veux bien qu’on continue à rester ensemble et qu’on se trouve un nouvel objectif, soit tu préfères partir et je t’amènerais où tu le souhaite. J’ai réussis à retrouver la trace des autres membres de ta tribu, mais je ne te l’avais pas dit toujours dans ma façon de voir les choses égoïstement. Tu as le droit de choisir. Je vais te laisser y réfléchir et je reviendrais te voir demain matin.

Thsczyikhaar fixa le visage baignée de larmes de Sarah avant de quitter la chambre en se téléportant. Une fois la pièce vide, Sarah éclata en sanglot et mis un long moment avant de réussir à se calmer.

Thsczyikhaar se téléporta aux quatre coins du monde complètement au hasard. Visitant les différents lieux qui l’avaient marqué. Finalement il fit une pause sur le sommet le plus élevé du monde et attendit que la nuit se finisse à l’endroit où il avait laissé Sarah.

Il se téléporta devant la porte de la chambre et frappa. Il avait repris une apparence humaine. Il attendit quelques instants puis il rentra. Il s’attendait à ne pas trouver la petite fille dans la chambre mais celle-ci l’attendait sur la chaise près de la fenêtre.

- Bonjour Sarah, je suis venu entendre ton choix.

Sarah le fixa durement sans un mot. Elle avait les yeux et le nez rougit par les sanglots.

- Bien je crois que j’ai compris, dit simplement Thsczyikhaar.

Thsczyikhaar était sur le point de sortir quand elle prit finalement la parole :

- Il faut pas laisser les petites filles seules la nuit. J’ai eut peur.

- J’avais besoin moi aussi d’être seul.

- J’ai pas bien compris tout ce que tu m’as dit mais j’ai bien compris que tu étais pas un gentil. D’habitude quand je te regarde, je vois dans tes yeux une lueur de « n’importe quoi » et c’est plutôt amusant. En ce moment tu l’as plus et ça me fait peur. Je croyais t’avoir jamais vu comme ça mais en fait je me suis souvenu de la première nuit, j’étais malade et fatiguée mais je me souviens de ton regard ce soir là, c’était le même.

- Oui je me souviens aussi.

- Ce que je sais, c’est que depuis que je suis avec toi cette lueur elle était toujours dans tes yeux et que je trouve ça bien. Je suis pas égoïste moi, je sais que quand je suis avec toi tu es moins méchant et je sais que ça c’est bien. Donc même si tu veux me manger, je vais rester avec toi.

- Sarah, je ne sais… commença Thsczyikhaar

- Laisse moi finir tonton, Mais si tu veux que je reste avec toi, il va falloir que toi aussi tu suives un peu des règles pour une fois. Je ne veux plus de secret, c’est bien ce que tu as fait ce soir même si ça fait mal, c’est comme faire le ménage, c’est pas rigolo mais c’est bien. Tu as fait le ménage dans ta tête et ça c’est bien. Si tu veux tout recommencer, faut le faire pour de vrai, faut plus tuer les gens, faut plus manger les gens, faut plus faire de truc qui font peur et faut être plus gentil. Tu vas continuer à m’apprendre la magie et moi je t’apprendrais à plus être un méchant. Ce te va tonton ?

- Oui, ça me va très bien, répondit Thsczyikhaar, merci ma puce.

- Me remercie pas, ça va pas être facile, dit Sarah d’un ton dur.

- D’accord si tu le dis, acquiesça Thsczyikhaar complètement abasourdi.

- Et encore deux petites choses…

- Je t’écoute ma puce.

- Premièrement, tu es moche en vrai et deuxièmement si tu es sage tu auras un cadeau.

- Compris mademoiselle, répondit Thsczyikhaar en éclatant de rire.

Sarah s’approcha de lui et le fixa droit dans les yeux. C’est avec joie qu’elle y retrouva la petite lueur habituelle. Elle se mit elle aussi à sourire. Cela n’avait pas été facile pour elle. Au début, elle voulait partir et ne plus jamais le revoir. Car elle avait bien compris que Thsczyikhaar n’était pas quelqu’un de fréquentable, qu’il avait fait beaucoup de mal et qu’il était égoïste. Mais elle se rappela des cours de magie et elle se dit que pendant ce temps elle avait appris une chose, la persévérance. Elle ne pouvait pas abandonner son oncle alors qu’il l’avait sauvé. Peut être pour de mauvais raisons au début mais il était indéniable que sans lui, elle serait morte depuis longtemps. Elle était persuadée que Thsczyikhaar pouvait changer et elle était déterminée à faire tout ce qu’il faut pour y arriver. Après tout elle était une elfe et d’après ce qu’elle savait elle pouvait vivre très longtemps. Elle espérait juste que très longtemps serait assez.

Thsczyikhaar s’assit sur le lit et fit signe à Sarah de venir s’assoir à côté de lui, ce qu’elle fit.

- Bien, donc si j’ai bien compris, tu vas me donner des ordres et donc par quoi tu veux qu’on commence ? demanda Thsczyikhaar.

- Tu cherches plus ton trident et je peux pas rentrer chez moi pour l’instant tant que je me serais pas occuper de toi, dit Sarah d’une voix songeuse, je pense que la première chose à faire serait de voir un peu des gens pour une fois et de faire un peu la fête. Peut être que tu te feras des amis et puis en plus c’est bientôt mon anniversaire, c’est une bonne occasion de faire la fête.

- Faire la fête… c’est une bonne idée, mais comment sais tu que c’est bientôt ton anniversaire ?

- Je ne sais pas mais bon faut bien en avoir un et je trouvais que c’était une bonne idée et je voulais des cadeaux.

- Très bien ma puce, je pense aussi qu’on a mérité de faire un bon break. Tu sais quel genre de fête tu aimerais ?

- J’aimerai une fête de princesse… mais bon je sais pas si ça va être possible, je suis pas une princesse.

- Laisse moi y réfléchir, je connais peut être une solution.

- Rappelle-toi ! Pas de mort ou de méchanceté, sinon je m’en vais !

- Oui, je sais, et ne te fais pas de soucis il n’y a rien de méchant dans ce que je veux faire.

- C’est bien, répondit Sarah catégorique.

- Il y a une grande ville à quelques jours de marche et je sais qu’un grand bal de la noblesse est prévu dans les jours qui viennent, on pourrait y aller.

- Hum… mais on n’est pas noble.

- Si je le suis, j’ai des preuves parfaitement légales ma noblesse, on pourra entrer sans aucun soucis.

- Bien, si tu le dis… répondit Sarah un peu sceptique.

- Je t’apprendrai à danser pendant le temps qu’il nous faudra pour y aller et aussi à te conduire comme une vraie princesse.

- Chouette tonton, c’est gentil, mais qui voudra danser avec moi, je suis trop petite.

- Ne t’inquiète pas, j’ai aussi une solution pour ça et ce n’est pas méchant.

- Parfait, on part quand !

- Des qu’on se sera un peu reposé, maintenant essaye de dormir un peu, on a eut une nuit agité.

- Tu as raison, dit Sarah en étouffant un bâillement

Elle s’allongea sur le lit et s’installa pour dormir. Thsczyikhaar se leva et alla se mettre dans un fauteuil comme à son habitude.

- Dis tonton ? demanda Sarah d’une voix un peu somnolente.

- Oui ma puce ?

- J’aurais quoi comme cadeau ?

- Tu verras.

- Dis tonton ?

- Oui …

- Je t’aime, murmura Sarah avant de s’endormir.